Transat retour ! C’est pas passé loin !!

C’est article risque d’être un peu technique mais c’est le moyen de vous transmettre les émotions de cette transatlantique.

Partir fin juillet des Bermudes pour aller aux Açores, c’est traverser l’Atlantique en étant hors de la saison, entrainant fatalement des problèmes de météo. Pour contrer ce problème, nous avons sorti notre joker : Antoine mon beau frère. Skipper émérite professionnel autrefois et maintenant pour le plaisir, aux nombreuses transatlantiques et autres aventures au long cours (ça va prend pas la grosse tête mais faut bien que je te donne du crédit, pour la suite du récit !). Antoine nous route (suivi météo et conseils) depuis le début, mais cette mission est le point d’orgue du voyage du fait de sa difficulté.

Nous nous mettons d’accord concernant les modalités de la transmission des informations:

  • Deux sms par jour sur notre téléphone Iridium : à 9h et 21h. Nous mettons la balise avant pour que notre position GPS soit connue. Le sms est généralement composé de trois parties : la première recense les différents acteurs du moment sur la zone (anticyclone, dépression, autre); la deuxième partie nous donne le vent et son évolution; la troisième nous donne le cap à suivre.
  • Exemple: Météo du 29/07 21h UTC. Anticyclone 35N50W. Vent S/SE 4à5 mollissant pour tourner E dans 96h. Garder cap 50/70°. 
  • Si ça commence à devenir chaud, un contact téléphonique est prévu, pour prendre les décisions. Nous gardons l’Iridium allumé pour cela 3h tous les soirs. Le téléphone satellite sera finalement allumé quasiment H-24.

Les jours passés aux Bermudes ne sont pas dédiés au tourisme, mais à la préparation du bateau. Complément de l’avitaillement réalisé aux USA. Réparation et entretient du bateau (changement des filtres moteurs, WC à déboucher, trouver une astuce pour réparer un chariot de latte de grand voile, changer les rivets de la baume, changer les joints des hublots avant qui commencent à prendre l’eau) ainsi qu’un check-up de tout le reste, vérifier toutes les manilles et boulons, le safran, le gréement dormant, etc…

Nous sommes fin prêt à partir le lundi 28 juillet. Dernier coup de fil à la famille, la copine et Antoine.

Condition météo OK, bonne route les gars !

Notre escale a duré trois jours. Les première heures en mer ne nous retournent pas le coeur malgré la houle croisée. Effectivement nous n’avons pas eu le temps de perdre notre amarinage acquis durant les huit jours de navigation depuis la Floride.

Petit cours de météo et de tactique pour transatlatique retour

L’objectif est de monter nord depuis les Bermudes, jusqu’à trouver la bordure nord de l’anticyclone médio-atlantique, généralement au niveau de la latitude de New-York. Il faut ensuite la longer et éviter régulièrement les dépressions qui vont venir le contourner par le nord.

Challenge, lors de notre départ, le vent est favorable sur les trois premiers jours mais l’anticyclone médio-atlantique (quel nom barbare) est très haut et semble bien installé ! Pour dire, il remonte quasiment jusqu’au Groenland ! Pour le contourner, il faudrait rajouter une ligne au sms pour nous préciser la présence des iceberg ! Mais on ne gâche pas trois jours de portant, alors c’est parti direction les Açores quitte à faire un peu de moteur !

Tranquille le matin, pas trop vite l’après-midi

Comme prévu, le vent est au rendez-vous les premiers jours, nous gagnons du nord. Mais avec le nord, nous rejoignons cet énorme anticyclone et le combat contre le vent commence. Vent 2/3 Beaufort puis 1à 2 Beaufort, puis rien. Moteur. Retour d’une petite brise, on ressort les voiles. Le vent tourne, nous vient dans le nez nous empêchant de caper et retombe à nouveau.

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Météo du 02/08, 9h UTC: Gros anticyclone qui semble redescendre à 96h. Next 12h, vent NE à SW 2 par 38N. Continuer à faire du NE ou du nord jusqu’au 40°N.

Nous avons déjà dépensé 24h de gazole sur les 96h d’autonomie que nous possédons. Antoine nous téléphone un soir pour nous résumer le problème. L’anticyclone semble bien installé, il va certainement falloir le traverser. Qui dit couper l’anticyclone dit moteur. En terme de distance, il nous reste 300 miles d’autonomie, un anticyclone peut faire jusqu’à 600 miles de large. Il va falloir bien choisir l’endroit pour le couper sinon cela risque de se finir sans gazole à attendre que le courant nous fasse traverser ! La traversée risque alors d’être bien plus longue. Nous recomptons les réserves en eau. Ça va, il nous reste plus de 25 jours d’autonomie sans rationnement. Le lendemain de ce compte, nous arrivons même à récupérer 12 L d’eau de pluie sous un gros grain, ce qui augmente de trois jours notre réserve d’eau douce. Mais rien à faire, nous ne sommes pas très sereins à l’idée passer 30 jours de mer à nous faire dépaler par le courant ! A la fin du coup de téléphone, Antoine rajoute : « Au fait, il existe une tempête tropicale sur les Caraïbes, à surveiller… »

Le lendemain, le 03 Août, nous arrêtons de combattre un adversaire qui n’existe pas. Les voiles sont ramenées. Pas de moteur en prévision de la traversée de l’anticyclone. Nous attendons donc sur une mer d’huile, au milieu de l’atlantique que la brise se lève. C’est une étrange sensation que l’attente en haute mer. Pas le peine de tergiverser, c’est l’occasion de se faire l’intégrale de Starwars, dans l’ordre! L’attente va durer 20h.

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Mais qui a invité Tata Bertha ?

Sur les sms météo une nouvelle donnée est apparue : Météo du 03/08 21h UTC: Anticyclone par 35N/60W. Tropical storm par 25N72W (au niveau des Bahamas) qui remonte.

C’est le début d’une nouvelle « préoccupation », car le sms du lendemain ne nous apporte pas une bonne nouvelle: Météo du 04/08 9h UTC. Anticyclone par 35N56W. Hurrican Bertha 32N72W (Floride) direction NE. Une nouvelle joueuse vient de rentrer dans la partie et elle avance vite. Le trajet naturel d’un cyclone est de longer la côte Est américaine et de venir se terminer sur les bancs de Terre-neuve et parfois de continuer faire la traversée de l’atlantique. Quel sympathique compagnon, qui a décidé de faire le même chemin que nous, mais bien plus vite!

Par chance, nous commençons au même moment à toucher du vent. Mais il va falloir faire vite et faire de l’est et laisser ainsi le cyclone nous contourner par le nord. Antoine nous passe un nouveau coup de fil.

Ça va le faire les gars, seule consigne, si je sens que ça commence à chauffer je vous demanderais de fuir au sud/sud-est pour éviter de vous prendre la grosse Bertha !

Pas de problème, mais c’est chaque fois avec une petite appréhension que nous ouvrons les sms météo d’Antoine, ne voulant pas trouver la consigne de fuite, signe que l’ouragan est sur nous!

Vous entrez sur les autoroutes de l’Est, l’Atlantique compagnie vous souhaite bonne route.

Mais le vent de SW s’établi sur la durée, l’anticyclone est descendu certainement grâce à la pression de Bertha (un mal pour un bien) et nous commençons à tracer notre route, plein est ! Les sms météo s’enchainent et se ressemblent, avec l’évolution de Bertha et le vent SW 5 Beaufort. Seule une petite touche personnelle : « Gardez la vitesse » continue de nous mettre la pression. Mais t’inquiète Antoine on se donne à fond ! Dès que le vent tombe, nous manœuvrons pour optimiser la voilure et profiter au maximum de l’air qui nous est offert pour aller au plus vite.

Voila les miles s’enchainent rapidement maintenant, et tous les midis le point du jour nous apporte des bonnes nouvelles. Hier bonne journée nous avons parcouru 153 miles. Le jour d’après 141 miles, avec un record à 160 miles. Bertha reste sur le banc de touche et fini par mourir au large de Terre-neuve.

Antoine nous avoue à l’arrivée, avoir eut du mal à trouver le sommeil pendant quelque jours.

Au final le vent à toujours été favorable sur les 10 derniers jours, au portant et la traversée a duré 16 jours, ce qui est une très bonne moyenne sachant toute la pétole que nous avons touché au départ et les 20h que nous avons passé à nous laisser dériver. Nous avons péché une dorade coryphène, fini l’intégrale de Starwars et du Seigneur des anneaux – version longue. Pris tous les soirs une petite bière avec une partie d’échec, quelque soit la houle. Lu un paquet de bouquin. Guillaume est le meilleur co-captain que l’on puisse rêver (même si il perd beaucoup aux échecs). Et surtout pris beaucoup beaucoup de plaisir à être en mer à se laisser porter, à sortir de toute notion de temps, à regarder les couchés de soleil et les étoiles. A voir le cycle de la lune avancer.

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C’est avec joie que nous avons touché la terre le 13 août pour enfin nous dégourdir les jambes! Mais déjà une pointe de nostalgie nous prend.

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C’est pourquoi nous avons remercier les éléments à la manière des vieux marins grâce à la boisson des capitaines:

« Une gorgé pour la mer »

« Une gorgé pour le bateau »

« Et une gorgé pour les capitaines »

AF

Relecture : Guigui

Et un grand merci à Antoine!

4 réflexions au sujet de « Transat retour ! C’est pas passé loin !! »

  1. Marielle
    14 août 2014 à 17:00

    Comme on dit à toulouse : putaing con merde heureusement que Bertha vous a fait chier mais pas couler .
    Comme on dit à Ciboure : baaa peur vous avez eu beaucoup .. la Bertha c est comme la Belhara ça passe ou ça passe pas . Vivants vous êtes et le bateau bien il est , milesker Maria de la mer !
    Bravo les héros ! Super chronique pour une belle traversée ; bravo Antoine , vous pouvez dormir tranquille maintenant !
    Marielle .

  2. 21 août 2014 à 00:29

    Bravo les gars!
    Bien conter de vous savoir de l’autre côté!
    Mis à part la grosse Bertha, vous avez eu aucun souci mécanique sur le bateau?

    Bon vent pour la fin

    Baptiste de Tidom au cap vert et guyane

  3. cedrick
    23 août 2014 à 11:39

    Salut à vous, je continue de suivre votre périple entre deux jours de boulot, et vous continuez de me faire rêver… A quand mon tour, à partir à la découverte du monde et de ses océans. Car je ne vous cacherai pas qu’ici, en France, la morosité s’installe, rythmée entre météo maussade, conditions de travail difficile et le tout sur un air de crise ou plus tôt de récession (le mot est plus précis!) Donc quand on lit vos récits, cela me permet de m’évader un peu et de croire en des jours meilleurs. Allez bon vent à vous, en espérant qu’il se mette à souffler et que les belles rencontres continuent à croiser vos chemins..

  4. valerie
    26 août 2014 à 16:01

    Quelle joie d’avoir de vos nouvelles!!! Je verifie reguliere sur la petit carte ou vous trouvez!! Nous vous etes « bientot » a bon port!! JC et moi avons passe un merveilleux voyage en Inde!! Nous aurions du faire un blog comme vous… nous ne sommes pas parties assez longtemps. Stay safe!!!

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